La ritournelle des États-voyous est familière: ils
ont besoin de taxer leurs citoyens à des niveaux extrêmement élevés parce
qu'ils leur fournissent des "services publics gratuits" qu'ils se
vantent parfois même d'être "de qualité". En réalité, ces
États-voyous fournissent surtout des fonctionnaires. Et chacun aura remarqué
que l'économie et la société "fonctionnent" d'autant moins bien au
fur et à mesure qu'ils empilent des "fonctionnaires". Une évidence
que soulignait le Fonds Monétaire International:
“Au plus un gouvernement est efficace dans
l’exécution de ses fonctions, au moins élevé sera nécessairement le niveau des
dépenses publiques”. [1]
Un niveau élevé de prélèvements est donc un
indicateur de l'incompétence et de l'inefficacité d'un gouvernement. Dans ce
domaine, il est intéressant de comparer le poids de la fiscalité dans
différents États. Une comparaison de la fiscalité des entreprises est peu
significative, car, dans ce domaine, les États se livrent une concurrence
effrénée, s'imaginant attirer de nouveaux investissements, ou éviter l'exode
des entreprises. La fiscalité des revenus des individus est plus révélatrice,
car elle touche aux droits fondamentaux des citoyens aux revenus de leur
travail, et parce que les citoyens sont moins mobiles, et donc plus corvéables,
que les entreprises.
En décrivant le système de la
“colleganza”, un cadre légal appliqué dans la république de Venise pour
permettre le partenariat entre capital et travail, un historien soulignait que
le rôle du gouvernement vénitien se limitait à la définition des droits et
obligations des parties, et à l’administration de la justice permettant
d’imposer le respect des règles. Le pouvoir se contentait d’une modeste
taxation des entreprises et des profits ainsi financés. Cette frugalité d'un
État, économiquement puissant, parce qu'il était resté volontairement dans les
limites de son rôle, est incontestablement l’une des raisons de la richesse de
Venise, tant celle des gouvernants que celle des gouvernés.
“[...] la taxation vénitienne
était faible - infinitésimale en comparaison des sommes punitives prélevées par
les byzantins sur leurs propres marchands, ou par la plupart des princes de
l’Europe féodale. Ainsi les profits étaient élevés, les motivations étaient
considérables, et l’investissement en capital augmentait d’année en année.” [2]
Il n'étonnera personne que l'"exception"
belge s'inspire plus de Byzance que de Venise, d'ailleurs définitivement
supprimée en tant que république indépendante, en mai 1797, par nul autre que
Bonaparte, ce grand défenseur d'un État modeste et limité …
La Belgique d'aujourd'hui, championne auto-déclarée
des droits de l’homme, confisque une part significative des revenus de ses
citoyens les plus modestes, afin de subvenir aux énormes besoins de sa
gigantesque bureaucratie, aussi tentaculaire que dysfonctionnelle et nuisible.
Le tableau compare ce que les citoyens de ce royaume ubuesque sont autorisés à
conserver de leurs revenus annuels avec la part que conservent les plus
modestes aux États-Unis. La tranche de revenus prise en compte va de 0 à 4000
€, et le taux de prédation est celui qui s'applique aux revenus de 2012, pour
un célibataire sans enfants [3]:
Il est atterrant de constater que ce sont précisément
les bureaucraties vociférant leurs prétentions à l’égalité, et qui prétendent
justifier leur propre existence parasitaire dans leur prétention à imposer par
la contrainte cette prétendue égalité, qui confisquent aussi la plus grande
partie des revenus les plus modestes. Au niveau de 1.200 euros de revenus
mensuels bruts (c’est-à-dire à peine supérieur au niveau de pauvreté aux
Etats-Unis), la bureaucratie américaine confisque 10%, mais la kleptocratie
belge vole déjà 20% du revenu brut d’un citoyen. En fait, les Etats-Unis,
décriés par les politiciens européens pour leur manque de “solidarité”, sont
aussi le pays qui taxe le moins les revenus les plus modestes: il est
préférable d’être pauvre aux Etats-Unis qu’en Belgique, cette dernière
confisquant une part considérable des revenus les plus modestes.
Bien entendu, le tableau ci-dessus ne peut tenir
compte des multiples distorsions, exemptions, exceptions, déductions, et autres
complications inventées par les administrations dans le seul but de justifier
leur existence. Certaines de ces perversions peuvent être dissimulées avec
beaucoup de talent par ces bureaucraties. Si, en Belgique comme dans d’autres
pays, un minimum de revenu est exempté d’impôt, avec le raisonnement que les
personnes aux revenus les plus modestes doivent être mises à charge de la
société, un stratagème permet à la bureaucratie non pas de déduire ce montant
de revenu minimum du total des revenus, mais de déduire le montant des impôts
dûs sur ce minimum (c’est-à-dire pas grand chose) du total des impôts
exigibles. D’un coup de crayon bureaucratique, tous les citoyens sont donc
imposés - abusivement et au mépris de l’équité sociale que l’administration
agite sous le nez des redevables - à un niveau de revenu artificiellement
rehaussé. Si la première "tranche" imposée à 25% est supposée être de
8.350€ annuels, elle n'est en réalité que de 1.550€!, la prédation étant déjà
de 30% dès 700€ mensuels, montant inférieur au niveau de pauvreté!
L'extrême injustice de cette perversion dissimulée
dans les codes [4] est donc préjudiciable aux revenus les plus
modestes. Et la progression est extrêmement rapide: tout ce qui dépasse le
montant de 1.000 euros bruts mensuels, pourtant proche de la misère, est
confisqué au taux de 40%! La rapacité des bureaucraties est devenue telle
qu'elles sont obligées d'aller débusquer leurs victimes parmi les moins
favorisés des citoyens, et que même les plus modestes et les plus faibles
cherchent légitimement à protéger leurs maigres revenus de leurs prédateurs.
NOTES
[1] Victor Tanzi
“Fundamental Determinants of Inequality and the Role of Government”, Document
de travail du Fonds Monétaire International, WP/98/178, Décembre 1998.
[2] “[...] In these early days Venetian taxation
was low - infinitesimal in comparison with the punitive sums levied by the
Byzantines on their own merchants, or by most of the princes of feudal Europe.
So profits were high, incentives great, and investment capital increased year
by year.” John Julius Norwich, “A history of Venice”, Penguin Books, London,
1983 [pages 155-156], traduction personnelle.
[3] Bien entendu, le nombre d’enfants, leur âge, la
situation maritale (ou co-habitationnelle...), et une myriade d’autres
conditions sont autant d’excuses pour varier les taux, et fouiner dans les
détails de la vie privée des citoyens.
[4] Contrairement aux Etats-Unis, où le citoyen
complète sa déclaration de revenus en y calculant lui-même les impôts dus (même
si ce calcul peut être rectifié par l’administration), la France et la Belgique
considèrent leurs citoyens comme des débiles mentaux incapables de calculer le
montant des revenus qu’ils auront à abandonner à la férocité et à la goinfrerie
des fonctionnaires.
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